Les deux premiers titres : Dieu t’a créé tu as crié… ! Un récit saramaca, de Michel Alimeck (illustrations de Catherine Combas, préface d’Olson Kwadjani), et Archéologie des trous de Stacy Hardy (traduction d’Elisabeth Malaquais et Jean-Baptiste Naudy).
Publié à compte d’auteur en 1980, Dieu t’a créé tu as crié… ! est un des
premiers textes d’un auteur saramaca à faire l’histoire des peuples marrons du plateau des Guyanes. Alimeck raconte le monde de ces descendants d’esclaves ayant fui les plantations, reconstruit une société au cœur de la forêt et combattu les esclavagistes et les colons dès la fin du 17ème siècle. Essai critique d’histoire alternative, chant et poème, ce livre hybride nous offre une plongée passionnante, incarnée, dans l’histoire du marronnage.
Les nouvelles d’Archéologie des trous se déroulent dans une Afrique du Sud oscillant entre fantastique et réalisme cru. Une narratrice aux yeux perçants et médusés ausculte les trous, qui sont partout : dans les corps, les désirs, la terre saccagée, les vies et les mémoires effacées, les amours et les massacres oubliés. Dans cette fresque hallucinée, on pourra tout aussi bien autopsier son propre cadavre, vivre à l’intérieur d’une vache, fomenter une révolte de travailleurs migrants, découvrir un empire déchu au fond d’un terrain vague, se livrer au trafic de poux, explorer un trou noir en creusant dans son jardin, ou être présent le jour où les blancs sont repartis par la mer.
Rot-Bô-Krik est une maison d’édition petite, indépendante, polyphonique, joyeuse et baroque. Elle est née à Sète à l’été 2021.
Rot-Bô-Krik publie des livres concis, de forme modeste et de format facile, pas chers, pour mettre en circulation des textes, fictionnels ou non, qui jouent les passeurs entre utopies d’hier et de demain. Elle entend propager des ouvrages improbables, méconnus, saillants, inflammatoires, cosmopolites, énervés, prolifiques, bariolés, coupants.
Sa géographie des émancipations est ouverte aux quatre vents. Rot-Bô-Krik veut ramener le tumulte dans un port, la France d’aujourd’hui, au milieu de ses antagonismes, de ses marbres et de ses luttes, de toute l’efflorescence de ses histoires par le bas. Que la traduction et le lianage soient une perspective politique. Reprendre donc le principe évoqué par le nom de la maison : Rot-Bô-Krik est l’ancien nom du quartier de la Crique à Cayenne, en Guyane, le quartier hors la ville coloniale. À la fin des années 1970, ce fut aussi le nom que se donna une revue anticolonialiste, créée par Shaka Karebu (ex-Michel Kapel), qui se voulait un écho et une actualisation de la lutte tricontinentale. À l’image de cette revue de politique et de poésie qui permit
de dire une autre Guyane, Rot-Bô-Krik veut diffuser des mots de tous les continents pour raviver les feux dans notre crique à nous.
En choisissant d’orner chacune de ses publications d’œuvres de William Morris, ardent défenseur d’un art émancipateur, réinventant un horizon en s’inspirant de pratiques populaires anciennes, Rot-Bô-Krik revendique le caractère artisanal et engagé de son colportage éditorial.